En bref :

– il n’y a actuellement aucune loi réglementant la publicité pour l’alcool, seulement une convention privée ainsi qu’un code éthique de protection des mineurs ;
– la seule loi (ou presque) qui existe concerne l’octroi d’espaces gratuits pour des campagnes d’éducation pour la santé au prorata des espaces publicitaires pour des boissons alcoolisées.

Constats

26/03/2009 : décret sur les services de médias audiovisuels en Fédération Wallonie-Bruxelles.

Art. 16 : « Les éditeurs de services qui diffusent de la publicité en faveur des médicaments et traitements médicaux ou en faveur des boissons alcoolisées doivent mettre gratuitement à la disposition du Gouvernement, selon des modalités à convenir après concertation avec les éditeurs de services concernés, des espaces publicitaires destinés à la diffusion de campagnes d’éducation pour la santé, égaux à ceux consacrés à la publicité en faveur des dits produits ou services ».
Ce décret s’inspire d’un précédent décret (18/07/1987) dans lequel une disposition similaire a été introduite en 1991. L’arrêté lié à ce décret, qui date du 18/01/1995, a été repris une fois le décret de 1987 abrogé, dans un nouveau décret du 27/02/2003, celui-là même qui a ensuite été coordonné le 26/03/2009.


Seulement une convention privée

Le secteur privé (alcool, distribution et Horeca) et les organisations de protection des consommateurs ont signé une « convention en matière de conduite et de publicité des boissons contenant de l’alcool » (12/05/2005). Ces acteurs sont les producteurs de bières, vins et alcools, les associations de consommateurs dont Test-Achats et le Crioc, le Jury d’éthique publicitaire (JEP), la distribution, le secteur Horeca (hôtels, restaurants, cafés) et les professionnels de la restauration.

Concrètement, le texte, dont le contrôle de son application se fait par le Jury d’Éthique Publicitaire, comprend une série de dispositions relatives aux jeunes mineurs d’âge :
• la publicité pour les boissons alcoolisées ne peut cibler les mineurs d’âge, ni par son contenu ni par son mode de communication ;
• elle ne peut, en particulier, représenter des personnes qui sont ou qui semblent être des mineurs d’âge consommant ces boissons ;
• elle ne peut inciter les mineurs d’âge à acheter ou à consommer des boissons alcoolisées en abusant de leur manque d’expérience ou de leur crédulité ; ni mettre en scène des mineurs ou toute personne en ayant l’apparence ;
• elle ne peut établir de lien permettant de croire que la consommation de boissons alcoolisées est une preuve de maturité ;
• il est interdit de, spécialement à des mineurs d’âge, soit distribuer (ou de faire distribuer), soit offrir gratuitement, soit à un prix symbolique des boissons contenant de l’alcool, soit encore procéder à des dégustations destinées spécialement aux mineurs d’âge.

De façon générale, le texte dispose que la publicité pour boissons alcoolisées ne peut pas :
• inciter ou encourager une consommation irréfléchie, exagérée ou illégale ;
• donner une image négative de l’abstinence ou de la sobriété ;
• développer d’argument qui fait état d’un effet favorable de la consommation de celles-ci pour prévenir ou combattre des problèmes physiques, psychologiques ou sociaux ;
• suggérer que la consommation d’alcool mène à la réussite sociale ou sexuelle – bien qu’elle puisse évoquer une ambiance agréable ou conviviale associée à la consommation de l’alcool ;
• susciter l’impression que la consommation de ces boissons permet d’affronter le danger avec succès ;
• suggérer que la consommation de boissons contenant de l’alcool influence positivement les performances sportives.

Par ailleurs, des mesures en matière de distribution sont prises :
• les boissons contenant de l’alcool doivent clairement être commercialisées comme des produits alcoolisés et éviter toute confusion, notamment dans le chef du consommateur mineur d’âge, si possible par une séparation physique ;
• la vente de boissons contenant de l’alcool ne peut pas s’effectuer via des distributeurs automatiques dans ou à proximité des écoles primaires et secondaires, des locaux de clubs de jeunes et de mouvements de jeunesse ainsi que des endroits où les mineurs se réunissent. Il peut être dérogé à ce principe si des moyens technologiques empêchent les mineurs d’acheter des boissons contenant de l’alcool.


18/01/2007 : nouveau code éthique de la publicité audiovisuelle à destination des enfants adopté par le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel.

L’ancien code qui datait du 10 juillet 2002 a été aménagé et actualisé d’une part en regard des modifications décrétales intervenues depuis et d’autre part en fonction de préoccupations nouvelles des acteurs médiatiques.
Ce nouveau code prévoit notamment que :
– « La communication publicitaire pour les boissons contenant de l’alcool quelle qu’en soit la teneur, ne peut pas être adressée spécifiquement aux enfants ni présenter des enfants consommant lesdites boissons ».
– « L’éditeur ne peut diffuser de la communication publicitaire pour des boissons contenant de l’alcool quelle qu’en soit la teneur juste avant et juste après les programmes pour enfants ».

Le jeune consommateur, encore plus vulnérable

La compréhension de la fonction publicitaire dépend des capacités de perception et de l’âge. Le libre arbitre de tout un chacun est guidé par la capacité des lobes frontaux et pré-frontaux à inhiber les réponses de notre cerveau primitif. Or, chez l’enfant et le jeune, les lobes frontaux et pré-frontaux sont encore immatures, et ceux-ci montrent donc plus de difficultés à traiter scrupuleusement un message, à comprendre l’intention persuasive, à distinguer une publicité d’un jeu, d’une information, et à contre-argumenter. Toutes ces difficultés sont accrues avec les nouvelles techniques de marketing plus discrètes et insidieuses (marketing viral, buzz marketing, placement de produits dans les films et les jeux vidéos, etc.).

Par ailleurs, c’est notamment à travers la publicité qu’ils se projettent dans le monde des adultes auxquels ils veulent ressembler et qu’ils imitent.

Comme les mineurs ont accès à l’ensemble des messages publicitaires, tant lors des émissions qui leur sont spécifiquement destinées, qu’à d’autres moments, c’est toute la publicité qui doit être réfléchie en fonction du souci de protection des mineurs.

Voir notre analyse critique pour aller plus loin.

Références